Édition originale El Expediente Anna Ajmatova, Alfaguara, 2022
Dossier Akhmatova
Traduit de l’espagnol (Mexique) par Marianne Millon
Illustration de couverture : Amedeo Modigliani
La narratrice, Vera Tamara Beridze, du Guépéou, a constitué un « Dossier Akhmatova », sur l’ordre de Staline, afin de discréditer la célèbre poétesse russe, Anna Akhmatova (1889-1966).
Ce dossier est constitué d’un collage de textes, certains écrits sur des écorces de bouleau, comme ceux retrouvés dans les goulags de la Kolyma, de poèmes, d’Akhmatova, de Pouchkine ou encore de Nikolaï Goumiliov, son premier mari, fusillé en 1921 sous l’accusation de monarchisme, de documents d’archives, de textes apocryphes et d’interventions de l’auteur.
De ce collage naît le portrait d’une femme qui n’a jamais plié, poursuivie toute sa vie par le tyran qu’elle avait rejeté en tant que poète et admirateur amoureux éperdu, ce qu’il ne lui pardonnera jamais. Staline ne l’enverra pas au goulag mais, pire, y fera déporter ses proches ou les fera assassiner, écrivant dans son dossier qu’il faut la « conserver », pour l’obliger à assister à tout ce qu’il aura ordonné pour faire de sa vie un enfer.
Grande créatrice, novatrice, Akhmatova deviendra une figure mythique et essentielle de la littérature russe et de la résistance au régime stalinien.
Ses textes souvent imprimés ou recopiés à la main de façon clandestine lui ont valu une grande reconnaissance de son vivant déjà, malgré l’interdiction de publier et même… d’écrire, par le biais de perquisitions régulières à son domicile.
Personnalité fascinante à l’attraction magnétique, capable très jeune de prédire les malheurs à venir et de composer en rêve certains de ses plus célèbres poèmes, Anna Akhmatova séduisait du seul regard, jusqu’à Modigliani, lors d’un séjour à Paris dans les années 1910. Et certainement Alberto Ruy Sánchez qui lui rend un hommage vibrant, puisant dans les sources documentaires et les ressorts du roman d’espionnage pour composer cet hymne au pouvoir des mots et de la poésie.